Au Sénégal, le mariage demeure, comme dans toutes les sociétés et chacune en fonction de ses référents, une institution centrale enracinée dans des valeurs culturelles et religieuses fortes.

post Longtemps perçu comme un ciment des alliances familiales et communautaires, il était traditionnellement fondé sur des bases sociales, éthiques et spirituelles profondes. Cependant, l'évolution des dynamiques socio-économiques et l'influence croissante de la modernité ont entraîné des mutations profondes dans la perception et la pratique du mariage au Sénégal.
À travers le texte, ainsi présenté, nous tentons d’explorer le mariage au Sénégal sous l’angle de ses transformations profondes dues à la modernité et aux dynamiques socio-économiques contemporaines. Autrefois considéré comme une relation sacrée, le mariage connaît, de nos jours, une mutation remarquable, matériellement déterminée. D’ailleurs, de plus en plus de jeunes semblent utiliser le mariage comme le levier opportuniste pour une ascension sociale souhaitée et une condition de vie meilleure. Sous ce rapport et par voie de conséquence, le régime matrimonial soulève des questions d’ordres éthique, juridique et sociétal ; ce qui, de la sorte, impose de se pencher, par la force des choses, sur les impacts de cette évolution et d’envisager de proposer des pistes de réflexion ayant pour but ultime de recomposer le lien entre la tradition et la modernité dont le tissu sur lequel elles reposent semble se détricoter.
Notre objectif, s’il faut bien le préciser, est de sensibiliser sur la crise connue par le régime matrimonial sénégalais en nous appuyant sur un ensemble de travaux portant sur la question.
Nous n’en doutons pas. Les conséquences de la marchandisation du mariage sont multiples. L'un des effets les plus visibles est l'explosion du nombre de divorces constatés, souvent prévisibles dès la conclusion de l'union. Bien évidemment, lorsqu'un mariage est motivé par des considérations matérielles, il perd de sa stabilité et se solde souvent par une séparation prématurée dès que les objectifs financiers sont atteints. Ainsi, une fois l’union scellée, les conflits liés au partage des biens et aux obligations financières se multiplient, complexifiant, de ce point de vue, les relations entre les ex-conjoints pour, enfin, affecter la structure familiale. Cette tendance, qui fragilise le tissu social, peut accentuer les tensions au sein des communautés et compromettre la paix sociale.
Un mariage stable, fondé sur une certaine éthique, constitue un pilier de la cohésion sociale. Lorsque les règles familiales, fondatrices du phylum parental, repose sur des valeurs d'honnêteté, de respect et de responsabilité mutuelle, elles contribuent, sans nul doute, à élever des citoyens respectueux des lois et des normes sociales. En revanche, un climat d'instabilité conjugale favorise des ruptures, des tensions intergénérationnelles et, dans la plupart des cas, entraîne une recrudescence de comportements antisociaux. Outre son impact sur la paix sociale, un mariage stable favorise la prospérité économique. Une famille unie est un cadre propice à l'éducation et à la formation des enfants, futurs acteurs du développement du pays. De plus, une bonne gestion des ressources familiales encourage l'épargne, l'investissement et la transmission de valeurs entrepreneuriales. À l'inverse, des unions précaires peuvent engendrer des charges financières imprévues qui freinent la capacité des ménages à contribuer à l'économie nationale.
Face à ces défis, plusieurs solutions peuvent être envisagées pour restaurer l'équilibre entre tradition et modernité. Il est primordial de sensibiliser les jeunes aux valeurs fondamentales du mariage à travers des programmes d'éducation et de formation. L'intégration de modules spécifiques sur l'éthique matrimoniale et les défis contemporains pourrait contribuer à encourager des unions fondées sur des bases solides et sincères. Ce faisant, une réforme du cadre légal du mariage, qui encadre les aspects économiques, pourrait être envisagée afin de prévenir les abus et de garantir une meilleure protection des conjoints.
À cet égard, les leaders religieux et communautaires ont également un rôle essentiel à jouer dans la préservation des valeurs authentiques du mariage. Leurs interventions peuvent contribuer à promouvoir des discussions préconjugales, comme il est de coutume en Afrique subsaharienne, axées sur le respect mutuel, l'engagement sincère et la responsabilité partagée. En effet, il est impérieux de réhabiliter la dimension sociale et spirituelle du mariage afin de réduire son instrumentalisation et de lui redonner sa place en tant que fondement de la stabilité des familles et des communautés.
Enfin, ce qu’il faut surtout retenir, c’est qu’au Sénégal, le mariage, bien qu'il reste un pilier de la société, subit une évolution qui pose de nombreux défis. Il est essentiel de rappeler que des unions fondées sur l'éthique et la déontologie renforcent l’harmonie de la famille, au double plan social et économique. Loin de rejeter la modernité, il s'agit plutôt de trouver un équilibre entre les valeurs traditionnelles et les transformations sociales, en favorisant une approche où l’humain et le spirituel restent au cœur de l'engagement conjugal. Et, à nos yeux, seule une action conjointe de sensibilisation, de régulation et de valorisation des valeurs authentiques du mariage permettra d'en assurer la pérennité et la stabilité et de contribuer ainsi à la paix et à la prospérité du Sénégal.

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Pr. Salif GAYE, Ambassadeur de la Paix Global Peace and Prosperity Initiative (GPPI), Sénégal
Vifs remerciements au Pr. Lamine NDIAYE de l’UCAD pour sa relecture

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