Depuis plusieurs années, la cybercriminalité occupe une place centrale dans le débat public sur la sécurité numérique.
Entre attaques de ransomwares, piratages de grandes entreprises et escroqueries en ligne, cette forme de criminalité évolue rapidement et devient une menace quotidienne pour les particuliers comme pour les institutions. Mais derrière cette lutte contre la cybercriminalité, une question essentielle se pose : le véritable coupable, le « KOCC » comme certains le désignent, est-il réellement arrêté ou s'agit-il d'une illusion de justice ?
Au Sénégal, l’avènement du numérique n’a pas seulement transformé l’économie et la société, il a également permis à certains vieux métiers de prospérer, souvent au détriment des valeurs morales et sociales. Des sites internet et réseaux sociaux, souvent anonymes ou difficiles à traquer, participent à la dégradation des moeurs, en particulier dans le domaine de l’exploitation sexuelle et de la prostitution clandestine. Depuis plusieurs années, le pays de la Teranga, réputé pour sa religiosité et ses traditions, voit ses frontières morales s’affaiblir face à la montée de plateformes web facilitant la diffusion de contenus à caractère sexuel. Ces espaces numériques servent de tremplins à des figures emblématiques du web sénégalais, tels que Kocc Barma, Leuk Daour, et Adamo, qui ont su tirer profit de ces réseaux pour leur propre profit. Kocc, dont la stratégie d’opération était jusque-là intraçable malgré la vigilance des informaticiens, a longtemps été perçu comme un maître dans l’art de manipuler ces plateformes. Leuk Daour, un jeune apprenti, s’est quant à lui illustré par sa capacité à déstabiliser avec ses contenus et ses méthodes. Enfin, le tiktokeur Adamo, très populaire ces dernières années, a été impliqué dans plusieurs révélations et scandales liés à l’exploitation du sexe sur internet. L’affaire la plus marquante remonte à 2017, lorsqu’un informaticien sénégalais a été mis en cause dans une affaire d’extorsion de fonds impliquant l’épouse d’un ancien ministre du Tourisme. La victime avait porté plainte pour tentative de chantage via des images diffusées sur Snapchat et un site de prono sénégalais. La polémique avait enflammé les médias, certains saluant la fin de Kocc, mais il s’avère finalement que ce n’était qu’un jeune informaticien ayant piraté la base de données de Kocc. Ce dernier a été jugé et condamné à six mois de prison. Récemment, la presse a évoqué l’arrestation du véritable Kocc, avec la mention de sa famille et de ses activités passées. Son père, autrefois à la tête d’une mafia de vente de sucre via son entreprise, avait été démantelé par la Douane pour fraude, mettant en lumière un contexte familial lié à des pratiques illicites. Aujourd’hui, 35 ans aprés, Kocc semble être derrière un écran, tentant de faire fortune dans le secteur du sexe, alimentant un marché noir qui détruit des jeunes vies. Parmi elles, celle d’une jeune femme qui témoigne : « Je venais d’avoir 18 ans, j’étais à Gorée en maillot de bain, sans en parler à ma famille. Deux jours plus tard, des copies de mes images circulaient en ligne. Une voix rauque m’a menacée si je ne versais pas 500 000 francs CFA. J’ai vite compris que j’avais commis une erreur. » Face à ces drames, beaucoup de jeunes ont choisi de divorcer, de quitter Dakar ou de se réfugier à l’étranger pour échapper à ces pratiques. Le nouveau régime sénégalais, engagé dans un processus d’assainissement de la presse et des réseaux, réfléchit à des mesures pour contrôler davantage ces sites de prono, qui sont devenus des terrains fertiles pour des groupes organisés, utilisant WhatsApp, Telegram ou d’autres plateformes pour coordonner leurs actions malveillantes. L’arrestation de figure comme Kocc pourrait être le début d’une lutte plus ferme contre ces réseaux. Cependant, la problématique reste entière : comment endiguer cette invasion numérique qui détruit des jeunes, corrompt la société et menace la stabilité morale du pays ? La lutte contre ces réseaux nécessite une approche globale, alliant régulation, sensibilisation et justice pour protéger la jeunesse sénégalaise de ces ravages numériques.
Le vrai KOCC mis à l'arrêt ou une illusion de justice ?
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Kaw Oumar Sarr